Après son projet HOOD VOLUME 1 sorti en janvier, le rappeur Houdi a une nouvelle fois frappé fort avec un nouvel album dévoilé le 13 septembre intitulé LE DERNIER RAYON DE SOLEIL. 2024 est décidément une année prolifique pour le rappeur masqué, qui a déjà un autre objectif en tête : une date au Zénith de Paris prévue en mars prochain.
Quand nous pensons à Houdi, ce sont des images de soleil et de plage qui nous viennent en tête. Et pourtant, c’est bien un masque de ski et une cagoule que porte le jeune artiste originaire du 77. Avec la sortie de son projet LE DERNIER RAYON DE SOLEIL, le rappeur qui s’est d’abord imposé dans le paysage musical grâce à son côté décalé, a fait du chemin et semble avoir pris en maturité.
Dans cet album, Houdi se livre avec sincérité plus que jamais auparavant. Si le visage de l’artiste nous reste caché, son cœur est bel et bien mis à découvert au rythme des 13 titres qui composent son projet. Entre mélancolie dansante à la Zamdane, cloud, samba et house, l’artiste parisien rend évidente sa polyvalence et son amour pour la musique.
Santé mentale : la fin d’un tabou ?
Dans son album, Houdi n’a pas peur d’assumer ce qu’il a sur le cœur. Sur PAPILLON, le premier titre du projet, le cadre de son mal-être est posé, au rythme d’une belle prod orchestrale.
« J’me sens comme le mec en haut du pont qui en a presque plus rien à foutre » – PAPILLON
Artiste torturé par ses blessures, Houdi ne cherche pas à embellir sa douleur, mais à la montrer telle qu’elle est : brute et directe.
La mort est d’ailleurs un élément qui revient souvent dans l’album. La notion d’une fin, d’un « dernier rayon de soleil » semble révélatrice des angoisses de l’artiste quant aux regrets qu’il pourrait éprouver de ne pas avoir atteint ses objectifs à temps ou de ne pas avoir profité de l’instant présent.
Au fur et à mesure que la trame de l’album avance, le rappeur s’avoue être malade. Dans DALIDA, titre en featuring avec So La Lune, Houdi se rappelle des époques plus sombres de sa vie.
« La chance a volé tous nos sourires, petit, j’voulais mourir, me mettre dans un sale état » – DALIDA
Mais c’est seulement dans l’avant-dernière track de l’album que l’artiste réussit enfin à mettre des mots sur la cause de ses maux : il souffre de dépression.
« Elle pense que j’ai un cœur encore, ma dépression elle est encore en cours
J’ai des séquelles, j’ai pas d’marques sur le corps, c’est fin d’mission, y a plus aucun recours » – JE T’AIME
À l’image de Danyl et Zamdane qui dénonçaient récemment les injonctions faites aux “Zhommes” à cacher tout signe de faiblesse physique ou mentale, le fait qu’Houdi reconnaisse et partage son mal-être est un autre pas vers la levée de la stigmatisation des maladies mentales dans la société, et tout particulièrement chez les hommes.
L’image du rappeur viriliste, qui ne montre pas ses faiblesses, a laissé place à une nouvelle génération d’artistes qui assument leur mélancolie, dont Houdi fait parti.
L’amour comme contradiction
Dans LE DERNIER RAYON DE SOLEIL, Houdi, amoureux de l’amour, semble pris dans une contradiction sans fin : il désire l’intimité et la connexion, mais se trouve freiné par la crainte de la trahison ou de la souffrance.
Cet amour qu’il cherche intensément est à la fois un besoin vital et une source de peur. Il l’exprime notamment dans JE T’AIME où il préfère « entendre le pire plutôt qu’entendre ‘Je t’aime’ ». Cette ligne révèle la dualité qui l’habite, où l’idée même d’amour, pourtant recherchée, devient une source d’angoisse.
« J’préfère entendre le pire plutôt qu’entendre « Je t’aime »
Mais je t’aime, mais je t’aime
J’avais pas prévu d’partir avant d’te dire « Je t’aime »
Mais je t’aime, mais je t’aime » – JE T’AIME
Pour Houdi, l’amour est donc une arme à double tranchant. D’un côté, il représente l’évasion, la possibilité de s’élever au-dessus de ses luttes intérieures. De l’autre, l’amour est une menace qui peut exposer ses faiblesses et provoquer une souffrance encore plus grande.
C’est d’ailleurs ce qu’illustre le clip TOTALLY SPIES ou le rappeur rencontre une femme à laquelle il s’attache jusqu’à ce qu’elle lui tire une balle, métaphore d’une trahison douloureuse.
Le rayon de soleil
À travers ce projet, Houdi se livre à une profonde introspection, partage ses doutes et ses interrogations, se demandant quelle place il occupe dans un monde souvent cruel et incertain.
« J’té-ma le ciel, j’essaie d’appeler, j’espère qu’il entendra » – UNE PLAQUETTE À MARBELLA
Même s’il avoue à plusieurs reprises se sentir maudit, Houdi ne se laisse pas aller à son sort et apporte des messages positifs comme dans CONTRE LA GALÈRE, où il met en avant l’importance de la solidarité face à l’adversité.
« Et tu m’verras faire l’aumône parce que j’suis pas tout seul, parce que y a l’autre
J’remercie l’ciel parce que j’peux manger à ma faim, j’remercie parce que y a l’eau
[…]
En vrai, c’est nous contre la galère et c’est pas facilement
Qu’on a su voir de la lumière, avoir des sentiments»– CONTRE LA GALÈRE
Dans LE DERNIER RAYON DE SOLEIL, Houdi dépeint un quotidien gris dans sa banlieue de Paris où s’entrelacent drogue, alcool, trahison et précarité ainsi que violences policières et frustration face à la montée de l’extrême droite.
Un quotidien sombre, donc, où il devient difficile d’apercevoir “la lumière” qui passe à travers les bâtiments. C’est en écho à une génération qui cherche des réponses que sa musique apparaît, et ouvre une porte pour traiter des sujets personnels et sociaux.
Mais pas de panique, l’album contient aussi bien entendu des musiques plus légères comme RAP CONSCIENT où l’on retrouve l’ambiance de vacances caractéristique du rappeur, et qui démontre une nouvelle fois l’extrême polyvalence de l’artiste.